Le rôle du père dans la construction de l'enfant


Que le couple parental soit uni ou non, le rôle du père reste fondamental dans la construction de l’enfant, de la naissance à l’âge adulte. Le père sera cependant trop souvent mis à l’écart, suite à une décision judiciaire inadaptée mais malheureusement probable dans l’état actuel des textes.

La femme devient mère par un processus biologique, tandis que l’homme devient père par un processus symbolique lié à l’environnement de l’enfant.

Une bonne image du père, dans l’esprit de l’enfant, lui permettra de jouer son rôle de façon satisfaisante. Une participation plus grande aux soins, dés le premier âge, facilite pour l’enfant la reconnaissance précoce d’une bonne image du père. Le père est celui qui amène l’enfant à prendre connaissance et conscience du monde qui l’entoure. C’est en s’opposant aux désirs de l'enfant que le père offrira une nouvelle image de lui, qui vient alors renforcer la triangulation père, mère, enfant.

Les messages positifs ou négatifs transmis par la mère, participent également à la construction de l’image intériorisée par l’enfant.

Vers 6 ans, si l’image intégrée jusqu’alors est suffisamment bonne, le père est perçu sur un mode de fascination " mon papa est le plus beau, le plus fort ", mais c’est à l’adolescence, si elle a été mal préservée, que la bonne image du père risque le plus d’être remise en cause.

Le père aide à construire la personnalité de l’enfant par un comportement différent et complémentaire de celui de la mère. Dès les premiers âges, le père provoque un éveil plus rapide, une sociabilité plus ouverte, une maîtrise du langage plus précoce, … Schématiquement, elle réconforte, lui stimule.

Par la suite, l’enfant attribuera au père les prohibitions, les interdits, les obligations, les ordres. Le père guide l’orientation sexuelle des enfants qui se définit par opposition au parent du sexe opposé et par identification au parent du même sexe. L’identification du garçon au père se fait directement, le père étant à la fois un modèle et un rival par rapport à la mère. Chez la fille, la fonction paternelle consiste à faire découvrir le rôle complémentaire de la mère, celui de femme et à participer à l’acquisition d’un modèle de féminité.

Le père participe à la construction de la personnalité de l’enfant, en favorisant l’acquisition de l’autonomie et de l’indépendance nécessaires à une vie affective équilibrée et de la confiance en soi utile dans les compétitions à venir. Dans cette fonction, il empêche de faire de la mère une mère abusive en l’aidant à accepter que son enfant finisse par se séparer d’elle.

L’absence du père, ou sa marginalisation, entraînera souvent un déséquilibre chez l’enfant.

Trop d’absence risque de gêner les processus d’identification. Les efforts de la mère pour assumer les deux rôles (paternel et maternel) seront souvent perturbants pour l’enfant.

Les absences du père peuvent découler de raisons professionnelles, du décès, de la maladie, d’un manque d’intérêt à la vie familiale, de la non reconnaissance de l’enfant, … mais le plus souvent d’une décision judiciaire liée à un divorce ou une séparation.

Rappelons qu’un couple sur deux se séparera. Dans l’état actuel de la législation et de la société, l’enfant est confié à la mère dans 80% des décisions judiciaires et assez rapidement un père sur quatre ne verra plus l'enfant.

Quand les parents se séparent à l’issue d’une procédure judiciaire aux mécanismes conflictuels, la mère, à qui l’exercice pratique de l’autorité parentale est confié, donnera trop souvent une image très négative du père à ses enfants.

Pour sauvegarder l’équilibre psychique de leur enfant, chaque parent devrait préserver l’image de l’autre, ce que le développement de la procédure judiciaire contrarie le plus souvent. Eviter les procédures judiciaires serait le plus sûr moyen de contourner leurs mécanismes amplificateurs du conflit et générateurs de frais exorbitants au bénéfice des économiques de quelques-uns.

Le processus d’identification à un père dont l’image est dévalorisée sera difficile. Selon Bernard Muldworf, l’enfant éprouvera un sentiment d’insécurité qu’il aura tendance à compenser par une relation de dépendance à la mère. Si elle-même ne sait pas répondre à cette situation, l’enfant risquera de développer une personnalité anxieuse et insuffisamment stable.

Si la relation mère-enfant est trop étroite, le développement de la personnalité de l’enfant dépendra de la personnalité de la mère. Si celle-ci présente un excès de sentimentalisme, l’enfant sera faible, capricieux, exigeant. Si elle est autoritaire et possessive, l’enfant n’aura pas confiance en lui, il ressentira un sentiment d’insécurité constant, au risque d’occasionner un être manquant de caractère, de courage, fuyant ses responsabilités et velléitaire. Bien sûr, ce sont des tendances.

Une des fonctions du père est d’encourager son fils à le dépasser, à s’opposer à lui dans la compétition œdipienne. Lorsque cette fonction n’est pas assurée, dans une angoisse à l’idée de s’opposer au père, les enfants peuvent se laisser aller à une situation de dépendance.

L’insuffisance de l’image paternelle chez la fille produit des effets contradictoires en favorisant des tendances homosexuelles par identification à une mère forte ou au contraire en favorisant la recherche incessante de l’homme idéal, aucun n’étant en mesure de satisfaire un besoin absolu de sécurité.

Les altérations de l’image paternelle entraînent chez l’enfant des difficultés d’identification, des difficultés dans ses capacités de communication, favorisant l’inhibition, l’instabilité, une tendance à douter de lui-même et à se dévaloriser. On note fréquemment chez ces enfants une dimension dépressive avec un sentiment d’accablement.

Lorsque le père ne remplit pas sa fonction, les enfants présenteront plus souvent des troubles caractériels. Ces enfants seront instables, agressifs, hyper-émotifs, anxieux, impulsifs, renfermés ou excités, coléreux...

Les enfants peuvent également manifester leur malaise au travers de comportements. Ils réagissent sur un mode réactionnel et évacuent les conflits par des actes. On constate que 75 % des délinquants juvéniles proviennent de familles dont les parents sont séparés.

Références, ouvrages à lire
- «Le rôle du père», article de Elsa Benoit (dont cette page comporte des extraits) http://perso.club-internet.fr/aflande/psycho/defaillancepere.htm
- « Le vrai rôle du père » de Jean Le CAMUS, psychologue professeur de la faculté, éd. Odile Jacob 2000,
- Bernard MULDWORF, Casterman, 1972, « Le métier de père »,
- « Quand la famille s'emmêle »de Serge Hefez, Ed. Hachette Littératures, 2004, 309 p. - 19,50 € ( une vérité assez peu confortable : l’amour fusion crée une dépendance déchirante, et toute rupture prendrait une dimension tragique, dont témoignent les pathologies adolescentes).